Le 29 avril 2010, soit précisément, à quelques jours près, il y a deux ans, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) remettait à la présidence du Sénat et à la présidence de l’Assemblée Nationale un rapport intitulé Pesticides et santé.
Ce rapport qui faisait le point sur les connaissances scientifiques sur les pesticides et la santé ne pouvait bien évidemment pas satisfaire les préjugés et les idées préconçues des écologistes.
Depuis lors la majorité du Sénat est passée à gauche. Il a bien fallu donner quelques satisfactions aux dix sénateurs écologistes qui n’auraient pourtant jamais été élus à cette magistrature si le PS ne la leur avait offerte.
Aussi la sénatrice socialiste Nicole Bonnefoy a-t-elle eu l’idée de lancer une « mission commune d’information portant sur les pesticides et leur impact sur la santé et l’environnement ».
Bon, reconnaissons qu’aux relations entre la santé et les pesticides, déjà traitées par l’Opecst, cette mission a ajouté la problématique environnementale.
La mission, qui devrait durer six mois, procède à des auditions et des visites sur le terrain.
La mission entend Monsieur Émeric Oudin. Monsieur Oudin est chef d’une entreprise spécialisée dans la fourniture d'équipements de protection individuelle pour l’épandage des pesticides. Ce chef d’entreprise déclare qu’à son étonnement, outre les agriculteurs, ses clients sont aussi des collectivités territoriales.
À ce sujet Monsieur Joël Labbé, sénateur écologiste du Morbihan, lui oppose « De moins en moins… » Ce à quoi le chef d’entreprise rétorque « ...sur le papier mais pas sur le terrain ! » Le sénateur ne peut supporter un tel blasphème de lèse-majesté et lui répond de façon péremptoire : « Sur le terrain aussi ! »
Le sénateur, plein de la suffisance de celui qui sait, enfin, de celui qui croit savoir, ne peut laisser passer de s’être fait moucher par un petit chef d’une petite entreprise. Aussi, un peu plus loin dans la discussion, avec beaucoup de morgue, celle des ignorants, entraine-t-il son interlocuteur sur un terrain qui n’est pas le sien : « Je souhaite que l'on ait de moins en moins besoin de vos produits ! Vous avez parlé tout à l'heure de "mauvaises herbes" mais cela n'existe pas en matière de biodiversité ! »
La biodiversité et la science des mauvaises herbes, la malherbologie (oui, oui, la malherbologie existe, il y a des chaires de malherbologie dans les écoles d'agronomie et des unités de malherbologie dans les instituts de recherche) ce n’est pas le rayon de Monsieur Oudin. Aussi, devant tant de science, se sent-il obligé de s’excuser : « J'aurais dû parler d'adventices, d'herbes concurrentes aux productions. »
En matière de biodiversité, les mauvaises herbes, ça n’existe pas ?
Il est certain qu’en biologie et en botanique, les mauvaises herbes, ça n’existe pas. La biodiversité, je ne sais pas ce que c’est, j’en attends toujours la définition scientifique.
Ce qui est également certain c’est que pour Monsieur Joël Labbé, assistant de laboratoire de sa profession avant d’avoir embrassé la carrière politique, la biodiversité est une notion qui s’oppose aux intérêts et au bien-être de l’humanité.
Car la science de Monsieur Joël Labbé est peut-être grande, mais elle ne va pas jusqu’à savoir que l’agriculture, qui nourrit les hommes depuis environ dix mille ans, c’est la lutte quotidienne contre la biodiversité, du moins telle que l’entend ce petit Monsieur.
Pour la clarté de l'exposé, je distinguerai l’agriculture au champ et l’agriculture en tant que secteur d’activité économique.
L'agriculture au champ
Au champ, quel est l’objectif de l’agriculteur ? Faire pousser, sauf quelques cas agronomiquement justifiés, une seule plante, en obtenir le rendement optimal et pour cela combattre ses concurrents (mauvaises herbes) et ses ennemis (insectes ravageurs, champignons et moisissures, bactéries, virus).
Dans ce combat, les pesticides sont une arme indispensable, même si elle n’est pas la seule.
Parmi les autres armes on peut compter des techniques anciennes, comme la rotation des cultures qui rompt, plus ou moins bien, le cycle de reproduction des parasites, la sélection variétale, dont les techniques efficientes sont relativement récentes (années cinquante en France) et, dernière en date, la transgénèse (OGM).
L'agriculture en tant que secteur d'activité
Pour ce qui concerne l’agriculture en tant que secteur d’activité, on entend la vox ecologistorum prétendre que l’agriculture moderne met en danger la biodiversité en ce sens que seraient cultivées de moins en moins de variétés et que les variétés traditionnelles seraient condamnées à disparaître.
Or, dans ce sens du mot biodiversité, les écolos nous racontent une fois de plus des calembredaines.
Qui fait le plus pour la diversité variétale ? Les sélectionneurs. Pour les seules plantes agricoles ou potagères le catalogue européen compte plus de 34 000 variétés .
De 1969 à 2005, le nombre de variétés de blé tendre dont plus de cent tonnes sont vendues annuellement sur le territoire français est passé de 30 à 150 et le nombre de celles dont moins de cent tonnes sont vendues annuellement est passé d’une vingtaine à 190.
Et la part de marché des vingt premières variétés vendues est passée de presque 100 % en 1974 à moins de 70 % en 2007.
En outre, au-delà du nombre de variétés commercialisées, les sélectionneurs savent que la création de nouvelles variétés, plus résistantes à telle ou telle maladie, plus adaptées à telle ou telle condition de sol et de climat, plus adaptées à l’évolution du goût des consommateurs, les conduit à conserver le plus grand nombre possible de variétés sauvages ou anciennes, dans lesquelles on ira un jour puiser les caractères recherchés.
C’est ainsi qu’ont été créées récemment la pomme Ariane et la fraise Gariguette, deux réussites remarquables des sélectionneurs français, variétés ultramodernes auxquelles on a trouvé ces si jolis noms antiques ou fleurant bon le terroir qui plaisent tant aux bobos.
On a du mal à imaginer le nombre de collections de variétés sauvages ou anciennes ainsi constituées et l’âpreté des luttes pour la définition de leur statut, c’est-à-dire du droit d’y accéder. C’est dire si la biodiversité, je veux dire celle des variétés, est considérée comme un enjeu économique et stratégique important, donc comme une source de richesse pour l’humanité.
Comme d’habitude, les écologistes nous bourrent le mou*.
* Et le PS leur a offert contre moins qu’un plat de lentilles, à vrai dire contre rien, trente députés dans la prochaine Assemblée Nationale. Pauvre France ! Ajoutez-y une politique économique néokeynésienne totalement inadaptée à une économie mondialisée et vous obtenez un désastre annoncé. Ou bien elle sera appliquée et ce sera la misère, ou bien elle ne le sera pas et cela fera de nombreux déçus. Dans cinq ans la Marine nationale fera aux environs de 25 % au premier tour. Je prends date, et pas pour dans cinquante ans, contrairement aux prédicateurs de l’apocalypse giecienne !
NB Maj du 9 mai 2010
Les pop-up qui apparaissent avec certains mots du texte et qui renvoient à une publicité pour Apple ne sont pas de mon fait et sont publiés à l'insu de mon plein gré. Je tacherai de régler ça au plus vite, mais pas demain, avec mon prestataire, Over-blog. Toutes mes excuses à mes lecteurs.
Pour en savoir plus
Audition de Monsieur Oudin par la mission d'information sur les pesticides
Présentation de son entreprise par Monsieur Oudin (vidéo, durée 1' 23" )
Le catalogue des variétés sur le site du Groupement national interprofessionnel des semences (Gnis).
Espace pédagogique du Gnis
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