Le 2 mars 2010, la Commission européenne a autorisé la culture d’une pomme de terre génétiquement modifiée, la pomme de terre Amflora, de la société BASF, destinée à l’industrie non alimentaire
Pommes de terres OGM transpercées par les terribles
transgènes bien visbles sur la photo
Le même jour la Commission a aussi autorisé la commercialisation de différentes variétés de maïs MON 863, résistantes à un redoutable ravageur, la chrysomèle du maïs.
On a vu une fois de plus se déverser le flot de sottises des anti-OGM, dont l’article d’Hervé Kempf est un véritable concentré. La qualité de journaliste de ce Monsieur se réduit à être porteur de la carte professionnelle car il est avant tout un militant altermondialiste et, comme il le déclare lui-même à ses lecteurs, dans un édito où il assimile le climatoscepticisme au lepenisme, un militant de la décroissance. Le Monde a eu tellement honte de cet édito qu'il en a rendu l'accès payant bien avant le terme habituel de quinze jours !
Le militantisme est incompatible avec le journalisme, car le militantisme conduit à présenter les choses sous l'angle le plus favorable à la cause qu'on défend, y compris par le mensonge.
Dans un monde normal cette autorisation de la Commisison européenne ne serait qu'un mini-évènement qui passerait plus inaperçu que le lancement d’un nouveau modèle de voiture par Citroën, Peugeot ou Renault.
C'est donc une excellente occasion pour inaugurer sur ce blog un petit feuilleton, celui des bêtises et des mensonges avancés par les anti-OGM.
Le présent article, qui en est le premier épisode, vous racontera la fabuleuse aventure du héros, Percy Schmeiser, agriculteur canadien, le petit David qui a fait vaciller le méchant Goliath Monsanto, c’est du moins comme ça que cela est présenté par les anti-OGM, notamment par Greenpeace et même par Radio Canada.
En 1998 Percy Schmeiser, un fermier canadien du Saskatchewan, est accusé par Monsanto d'avoir utilisé des graines d'un colza génétiquement modifié pour résister au désherbant Roundup et d’avoir ainsi violé le brevet de Monsanto.
Condamné en première instance, puis en appel par la Cour fédérale canadienne, Percy Schmeiser en a appelé à la cour suprême du Canada.
Pour sa défense Percy Schmeiser a constamment fait valoir que le colza transgénique était arrivé dans son champ de façon inopinée et sans son intervention.
Mais le tribunal de première instance, confirmé en dernier ressort par un jugement de la Cour suprême du Canada, rendu en 2004, a établi qu’il y a eu dans un second temps des actes délibérés de sélection par l’agriculteur, qu’il a ressemé sur 1030 acres, soit environ 400 hectares, un colza contenant entre 95 et 98 % de graines résistantes au Roundup, et a ainsi échappé à la redevance due à l’inventeur, en l’occurrence Monsanto.
La Cour suprême a donc reconnu Percy Schmeiser coupable de contrefaçon.
Sans doute parce qu’il savait ce moyen fragile, Percy Schmeiser a-t-il aussi contesté à divers titres la validité du brevet déposé par Monsanto. Sur ce point, dans le même arrêt de 2004, la Cour suprême du Canada, a réfuté tous les moyens de défense de Percy Schmeiser. Elle a notamment confirmé que la Loi canadienne sur les brevets protégeait non seulement les gènes et les cellules obtenues en laboratoires mais aussi les graines, quelle que soit leur génération, contenant les gènes protégés par le brevet.
La Cour a cependant invalidé la condamnation en première instance de Percy Schmeiser à verser des dommages et intérêts à Monsanto. En effet la loi canadienne sur les brevets stipule que le détenteur du brevet doit choisir entre la demande d’être indemnisé de ses pertes, notamment en redevance non perçue, ou bien des profits illicites réalisés par le contrefacteur. Monsanto a choisi depuis le début de la procédure cette deuxième solution.
Or, Percy Schmeiser n’a pas utilisé de Roundup sur ses 1030 acres (bien qu’il ait pu en avoir l’intention si cela s’était avéré utile). Il n’a pas vendu son colza comme semence mais comme aliment du bétail et ne l’a donc pas vendu à un prix supérieur à celui d'un colza non résistant au Roundup. Il n’a donc pas réalisé de profit lié à l’invention de Monsanto.
Ce jugement est important pour au moins deux raisons :
Il établit qu’un agriculteur n'est coupable de contrefaçon et ne doit donc une redevance pour un gène breveté que s’il utilise frauduleusement des semences contenant le gène breveté, pas s’il ressème des graines fortuitement pollinisée par des plantes transgéniques cultivées par ses voisins. Pendant longtemps c’est pourtant l’intention que les organisations anti-OGM ont imputée à Monsanto.
C’est bizarre, maintenant que le jugement définitif a déclaré Percy Schmeiser coupable de contrefaçon délibérée, cette accusation portée contre Monsanto est devenue introuvable sur les sites anti-OGM : le ménage a été bien fait !
Au bout d’une solide argumentation juridique la Cour suprême canadienne a confirmé que la loi canadienne sur les brevets protégeait les plantes transgéniques et leur descendance, offrant ainsi une solide protection à la propriété intellectuelle, indispensable au progrès technique. A cet égard, Percy Schmeiser n’est pas le petit David de la vulgate écologiste. David, lui, avait terrassé Goliath !
Diabrotica virgifera virgifera : la chrysomèle du maïs
Bibliographie
Jugement de la Cour suprême du Canada
Les actes délibérés de Percy Schmeiser pour utiliser des semences portant le gène protégé de Monsanto sont énoncés dans les articles 59 à 68 de l'arrêt de la cour. Les articles concernant la validité du brevet de Monsanto sont également très intéressants pour ceux qui s'intéressent aux aspects juridiques et politiques de ce sujet.
NB Pour comprendre le jugement de la Cour suprême canadienne et certains articles de presse il faut savoir que les colzas à faible teneur en acide érucique ont été rebaptisés "canola" par les Canadiens.