Mardi dernier, l’émission Service public, d’Isabelle Giordano, sur France Inter, était consacrée à la polémique relancée récemment par Réseau environnement santé à propos de l’aspartame.
L’aspartame est l’édulcorant, substitut du sucre, parmi les plus utilisés au monde, par exemple sous la marque bien connue Canderel, ou encore dans de nombreux produits light de l’industrie alimentaire.
Il a été mis sur le marché en 1974 aux États-Unis, autorisé en France en 1981 et consommé depuis longtemps dans un très grand nombre de pays.
Cette émission opposait André Cicollella, président du Réseau environnement santé (RES) et Jean-René Buisson, président de l’Association Nationale des Industries de l’alimentation (ANIA).
Malgré son nom pompeux, Réseau environnement santé n’est que le regroupement d’un ramassis d’organisations écologistes, dont le but est de susciter l’inquiétude dans les populations, au service de la notoriété de ses membres, de ses dirigeants et de ses porte-parole, dont André Cicolella, lanceur d’alerte professionnel.
Jean-René Buisson, lorsqu’il a été élu en 2004 président de l’Association nationale des industries de l’alimentation a démissionné de sa fonction de secrétaire général du groupe Danone.
Le but de ce billet n’est pas de faire le point sur la polémique à propos de l’aspartame, qui est, dans mon esprit, classée depuis longtemps.
Au début de l'émission, après dix bonnes minutes accordées aux détracteurs de l’aspartame, pour l’essentiel à Monsieur Cicolella, Jean-René Buisson oppose une défense percutante, susceptible de convaincre nombre d'auditeurs. Jusque là les arguments, de part et d’autre, ne portent que sur le cas de l’aspartame.
En difficulté, déstabilisé, Cicolella lance alors une manœuvre couramment utilisée par les écolos de mauvaise foi dans ce genre de situation. Il change de terrain, il passe à une généralité n'ayant un rapport que très indirect avec la question des propriétés cancérogènes de l’aspartame.
Cicolella déclare : « Aujourd’hui nous sommes face à une épidémie de cancers, un homme sur deux, une femme sur trois, le taux de cancer a doublé en vingt-cinq ans et qu’est-ce qu’on fait pour arrêter cette épidémie ? Et bien pour l’instant nous n’avons pas les moyens, nous n’avons pas réussi à arrêter cette épidémie. Et c’est là le vrai problème, éliminer de notre environnement tout ce qui génère un risque cancérogène ».
Non seulement cette généralité ne peut tenir lieu de preuve de l’effet cancérogène de l’aspartame, mais elle est en outre parfaitement fausse. Il n’y a pas d’épidémie de cancers, affirmer le contraire est un mensonge (voir mon article Il n'y a pas d'explosion des cancers).
Jean-René Buisson est un honnête homme. Il oppose à Cicolella des arguments qui ressortissent de sa spécialité professionnelle. Le point de vue des scientifiques sur l’aspartame, il le connait, il en parle, il argumente.
Plus tard, quand la discussion bifurque momentanément vers le bisphénol A, le machin avec lequel on affole les populations à propos des biberons, les bébés c’est tellement émouvant, il démentira les accusations de Cicolella.
Mais l’épidémie de cancers, ce n’est pas son domaine, il n'est pas cancérologue, il n'est pas épidémiologiste, c'est juste un industriel qui connait ses dossiers. On n’entendra donc dans l’émission aucun démenti à l'assertion mensongère sur l'épidémie de cancers.
Bon, voilà ma conclusion en forme de morale à la façon du bon Jean de La Fontaine :
« Opposez un menteur généraliste à un spécialiste honnête, il en sortira plus de mensonges que de vérités ! »
C’est malheureusement ce qui arrive trop souvent dans ce genre d’émission radio ou télé.
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